Parfois le matin, on se lève en sentant qu'on va passer une mauvaise journée. On sait pas pourquoi, ni ce qui nous dit ça, mais on le sais, ça doit être comme un sixième sens. Et puis la journée passe, on se dit que finalement c'était peut-être qu'un mauvais pressentiment, et puis boum, il se passe ce qu'on redoutais. Enfin il se passe quelque chose qui confirme nos doutes du matin, on ne savais pas quoi encore à ce moment là et puis ça arrive, tout simplement. Alors on stress, on panique, on ne sais pas quoi faire, on déprime, on réfléchis mais on ne trouve jamais la solution. Il faut juste attendre que ça passe, que ça aille mieux, que la blessure se résorbe. A ce moment là, et seulement à ce moment là, on peut avoir les idées claires et prendre le recul nécessaire sur la situation. On prends enfin un bol d'air, quand tout est calmé, quand la situation s'est stabilisée. On respire, comme un enfant qui se calme enfin.

C'était mon cas aujourd'hui, ce matin je me suis levé avec un mauvais pressentiment. Un rendez-vous important annulé ? Un poulain qui finit par se casser la figure après un entretien ? Une bourse annulée ? Je ne savais pas. Mais je n'étais vraiment pas bien au réveil. Je finis par souffler et me dire que ce n'était rien, que ça allait passer, qu'il ne fallait pas que je m'en fasse. C'était juste un sentiment après tout, un doute, une illusion faite par mon esprit. Je devrais arrêté de trop réfléchir le matin. Je prends mon café un peu la tête dans le brouillard encore, et file sous la douche histoire de bien me réveillée. J'aime faire couler l'eau sur moi pendant de longues minutes, ici c'est le seul endroit où je ne réfléchis pas, où ma tête est totalement vidée de toutes pensées désagréables. C'est un bonheur. Je finis par ressortir vingt minutes plus tard, enfiler mon costume de travail et partir. En arrivant devant les locaux, mes pensées du matin m'avaient totalement quittée. C'était reposant ! Je passe alors la porte d'entrée et la secrétaire accours vers moi, l'air paniquée, et mon pressentiment revient au galop. Tu vois Weiss, faut toujours écouter sa tête ! Elle m'explique en hurlant et en bafouillant qu'un poulain est tombé dans les escaliers. Pardon ?! Ah non mais ça c'est pas possible ! Je me précipite à ses côtés accompagné de ma secrétaire, et ordonne aux gens de s'écarter. Évidemment ça ne marche que quelques secondes, la curiosité humaine les forces à se rapprocher à nouveau. Elle est tombée, elle à une blessure à la tête et mal à la jambe. Tu m'étonne, une chute dans les escaliers ce n'est jamais bon.

J'ai ordonné à ma secrétaire d'aller me chercher quelque chose à mettre sous sa tête ainsi qu'une couverture. Elle est partie et je suis resté au côté de la jeune fille qui est tombée. J'ai levé la tête vers l'une des personnes devant moi en demandant, d'un air paniqué mais en tentant de me calmer -je suis le patron quand même- « Quelqu'un à appeler les secours ? » Le jeune homme devant moi m'a répondu que oui, et mon attention s'est reporté sur mon poulain. Ces jeunes sont sous ma responsabilité, et je déteste les voir malheureux, malade ou blessé. J'aime mon travail bien plus que je ne peux aimer n'importe quelle autre sortie, et m'occuper d'eux c'est un bonheur. Chez Weiss Industrie c'est un peu comme une grande famille, et là j'étais vraiment, mais alors vraiment en stress pour elle. Une blessure à la tête ce n'est jamais anodin. Ma secrétaire est revenue avec une couverture et un sac en toile dans lequel elle avait glisser une veste, bien ça servira d'oreiller. Je les place sur son corps et sous sa tête et entends les urgentistes arriver. Bon timing ! Je m'écarte et les laisse faire. J'entends la jeune femme me dire merci par l'intermédiaire des gens qui écoutent autour mais ne réponds pas, elle est trop occupée je le ferais plus tard. Ils l'emmènent et je la suis, je ne la quitterais pas des yeux c'est impossible. Ma secrétaire me suis jusqu'à la sortie, je la regarde et lui dis en continuant de marcher « Annulez mes rendez-vous pour la journée. Je restes avec elle. Je vous tient au courant ! Et appelez ses parents. Même si elle est majeure, ils doivent savoir. ». Puis j'insiste pour monter dans l'ambulance avec elle, jusqu’à l'hôpital.

Sur les lieux elle est prise en charge très rapidement, ça me rassure un peu. Je reste debout à faire les cents pas, puis m'arrête pour prendre un café à la machine. Après tout, je ne peux rien faire et stresser ne fera pas avancer la chose plus rapidement. Je respire un bon coup pendant que coule mon café, et la jeune femme qui à pris en charge mon poulain tout à l'heure viens me voir. Elle tente de me rassurer, et je lui souris poliment. Puis elle continue de me parler, tant mieux, ça me changera les idées le temps que j'ai des nouvelles. Je lui tend la main pour me présenter en bonne et due forme. « Oui je suis le patron. Fallon Weiss. Non malheureusement je n'étais pas encore arrivé, mais ils m'ont prévenu dès mon arrivé, et apparemment l'accident venait de se produire.. » Soudain j’eus un pincement au cœur. Je regardais mon café dans mes mains, en vérité je n'en ai même pas envie de ce truc.. Si je n'avais pas trainer sous la douche ce matin, peut-être que j'aurais pu éviter cela. Mais comme on dis, avec des "si" on mettrais New-York en bouteille. « C'est une jeune femme dont s'occupe ma société. Nous recherchons des jeunes talents. Elle est douée cette fille, elle gardera des séquelles ? » Évidemment ce n'est pas pour moi ou pour ma société que je pose cette question, mais je sais que son rêve est de devenir mannequin, et je lui ai promis que je l'aiderais à réaliser son rêve. Alors j'espère que tout ira bien.. Enfin bon.. Je relève la tête et souris une fois de plus à la jeune femme, poliment mais surtout pour cacher ma peine. Je soupire et vais m'asseoir sur les chaises non loin. Je la regarde à nouveau. « Vous pensez que j'aurais des nouvelles rapidement ? » J'ai beau continuer à parler avec la jeune femme, mes pensées ne se libèrent pas. Je m'en veux de ne pas être arrivé plus tôt.